La famille d’Andréis est d’origine fort ancienne. Augustin-Marie après ses études secondaires entra au séminaire et fut ordonné prêtre en 1907. Il fut aussitôt nommé dans une importante paroisse de Nice à forte dominante populaire.
En 1911, l’abbé d’Andréis ayant eu connaissance de la création de « boys scouts » en France (Les Éclaireurs de France) se documenta sur la question et eut l’idée de créer dans son patronage une section « d’Éclaireurs catholiques » en pensant que la méthode pouvait devenir un moyen encore plus motivant pour les jeunes dont il s’occupait.
Dès le premier trimestre de cette année 1911, avec les autorisations ecclésiastiques nécessaires, l’abbé d’Andréis fondait la première troupe d’éclaireurs catholiques pouvant se targuer d’une filiation directe avec le scoutisme de Baden Powell.
A l’origine du scoutisme catholique
A cet égard, on peut dire que bien longtemps avant le chanoine Cornette, le Père Sevin ou Edouard de Macédo (les trois co-fondateurs officiels des Scouts de France), l’abbé d’Andréis fut le premier à créer en France une forme de scoutisme catholique. Certes, il existait encore des différences avec les principes de B.P., cependant on y retrouva très rapidement une « loi » en 12 articles, un serment de fidélité à Dieu et son pays, inspirés du livre du capitaine Royet, et un uniforme qui se rapprochera vite de celui des boys scouts de l’époque. S’appuyant sur les grands patronages de la ville de Nice et même ceux des environs, l’abbé d’Andréis constitua des « sections » en leur sein. Chacune de ces sections comprenait huit garçons recrutés dans le même quartier, souvent la même école et le même patronage. Sous la conduite d’un chef, chaque unité se regroupait obligatoirement dans son patronage d’origine. Avec plusieurs sections on constituait une troupe.
Fondation des Eclaireurs des Alpes
L’intérêt des garçons qui bientôt se mua en véritable enthousiasme fut tel que les troupes se multiplièrent à Pauliani gagnant les patronages de St. Pierre, de N.D. du Port, de St. Joseph. L’abbé d’Andréis s’organisa alors rapidement en donnant d’abord un nom à ce nouveau mouvement baptisé les « Eclaireurs des Alpes ». Toujours muni des permissions supérieures, indispensables dans l’Eglise, il structura l’ensemble à la façon de l’époque et dans un style très para-militaire. Ainsi les troupes d’un même département formait un « régiment » sous la conduite d’un « général ». Chaque troupe et chaque régiment gardait son drapeau confié aux soins d’une troupe centrale, siège du gouvernement comprenant, outre ce général, les chefs de troupes et les aumôniers-directeurs.
L’uniforme, dès lors, consista en une casquette alpine, une chemise de type militaire, une cravate aux couleurs de chaque patronage, très vite remplacée par un foulard, une culotte noire flottante tenue, soit par une ceinture en tissu également noir, soit par un ceinturon de cuir fauve ! Au dessus des chaussures de marche on devait enrouler des bandes moletières... . L’ensemble se complétait d’un sifflet, d’un couteau et d’un bâton.
Le programme des Éclaireurs des Alpes se rapportait surtout à la technique. Il comprenait l’envoi de signaux par un télégraphe à monter soi-même, ou au sifflet. Il fallait connaître et utiliser les nœuds, savoir dresser une tente, suivre une piste, pouvoir faire une cuisine simple, porter secours aux blessés, avoir de bons rudiments d’hygiène et apprendre les premiers rudiments de botanique et de zoologie.
L’éducation physique avait une place de choix et l’on demandait en outre aux Éclaireurs de savoir monter un pont et de s’orienter dans la nature à l’aide d’une carte et d’une boussole. Prêtre apprécié de ses supérieurs, l’abbé d’Andréis avait l’oreille de l’évêque de Nice : Mgr Henri Chapon qui s’intéressa, dès leur création, à ses chers boys scouts. Il faut dire que ce prélat, comme l’abbé d’Andréis, recevait favorablement les propos de Marc Sangnier.
En 1913, les Eclaireurs des Alpes obtinrent l’agrément du gouvernement, puis la reconnaissance officielle de leur évêque dans le département des Alpes-Maritimes. A ce moment le mouvement gagnait déjà d’autres localités comme Villefranche-Sur-Mer ou quelques villages de l’arrière pays Niçois.
Pour consacrer leur indépendance, Mgr. Chapon offrit aux Eclaireurs des Alpes niçois un local plus vaste, compte tenu de leur grand nombre. (Ils étaient 150, rien qu’au seul Cercle Pauliani). Ce nouveau local était situé dans l’Ecole libre de N.D. du Port et avait une entrée séparée. « Vous pourrez convier là tous les groupements de boys scouts de la ville ou du diocèse qui voudront bien s’allier à vous » ajoutait l’évêque décidemment fort bien disposé. C’est dans ce nouveau Q.G. que l’abbé d’Andréis dirigea jusqu’en 1923, d’abord les Éclaireurs des Alpes, puis les troupes rattachées à la Fédération des Éclaireurs Catholiques puis plus tard aux Scouts de France.
Durant la Guerre 14-18
Seule la guerre déclarée le 2 août 1914 avait apporté un ralentissement à l’essor du mouvement qui, pour suivre sa devise « Dieu et Patrie », s’était mis à la disposition des autorités militaires pour rendre des services. C’est ainsi que les EDA furent conviés à s’occuper de l’accueil des nombreux blessés envoyés dans les hôpitaux de la région, à acheminer des messages rapidement, voire à collaborer avec les régiments de territoriaux pour la garde des ponts.
Malgré ces événements douloureux et la mobilisation de l’abbé d’Andréis dans la région de Nîmes, de nombreuses fondations de troupes dans le sud-est de la France se placèrent sous la bannière et le règlement des Éclaireurs des Alpes. Ainsi en allait-il de Sète, Avignon, Montélimar, Montpellier, Nîmes, Toulouse, Aigues-Mortes, etc... Mais l’intérêt pour ce mouvement se manifesta même bien au-delà puisqu’on enregistra des créations de troupes à Meaux et même à Lille. Pour répondre à tant d’appels, une Fédération nationale fut constituée avec un siège à Paris. Il faut noter, cependant, que beaucoup de ces créations furent faites dans un esprit patriotique né de la guerre avec la volonté des participants de faire une sorte de préparation militaire et surtout de participer à l’effort de guerre selon des moyens même modestes.
L’abbé d’Andréis devant ce succès s’efforça de prendre contact avec le scoutisme britannique, sa référence, de façon à échanger de la documentation et des idées. C’est ainsi qu’il noua des liens avec le Q.G. anglais (British Boy Scout Association, alors située 25 Buckingham Palace Road, et plus spécialement avec Hubert Martin, commissaire international). En 1919, alors que la guerre était terminée depuis le 11 novembre 1918, Hubert Martin demanda à l’abbé d’Andréis les statuts de son mouvement et lui conseilla vivement de rejoindre la Fédération des Scouts français (10, Rue Laffite à Paris) afin de pouvoir être reconnu offciellement par le Scoutisme international. Peu de temps après, l’abbé Cornette, vicaire à St. Honoré d’Eylau à Paris prenait contact avec l’abbé d’Andréis pour lui écrire qu’au moment de la fondation des « Entraîneurs », il ignorait l’existence des Eclaireurs des Alpes.
Création des Scouts de France
La création des Scouts de France avec le Père Sevin et Edouard de Macédo venait, somme toute, se juxtaposer à l’existence d’une organisation déjà en plein essor ! Les relations au sein de la hiérarchie catholique du futur chanoine Cornette et du Père Sevin, allaient rapidement donner la primauté à la fondation des SDF. Le Comité de soutien créé à cette intention et rassemblant des personnalités de l’Église, de la politique, et de l’Armée emporta l’adhésion du plus grand nombre. De ce fait l’abbé d’Andréis bien qu’ayant eu l’antériorité, mais situé à l’extrémité de l’hexagone et ne se dérangeant que peu pour assister aux réunions qui eurent lieu presque exclusivement à Paris fut, pour ainsi dire, contraint de se rallier aux Scouts de France, dont il devint membre du Comité directeur du début de 1921 à la fin de 1922.
Les difficiles relations avec le mouvement scout
L’éloignement et les relations épistolaires entre l’abbé d’Andréis, l’abbé Cornette et le Père Sevin furent des facteurs d’incompréhension. Malgré le ton amical et fort courtois des missives, le fondateur des Eclaireurs des Alpes jugea bon de reprendre sa liberté au début de 1923. A ce moment l’abbé d’Andréis tenta de reconstituer son organisation, mais l’essor des SDF et les concours qu’ils gagnaient peu à peu dans tous les milieux étaient tels que les Eclaireurs des Alpes furent mis en porte à faux. En 1925, l’abbé d’Andréis rentra avec ses unités définitivement au sein des Scouts de France à qui ils apportèrent leur soutien. Du reste, à cette époque la 1ère Nice SDF conservait l’étendard de la première troupe des Eclaireurs des Alpes avec le titre de « Première France ». Dans les documents qu’il laissa à sa mort, l’abbé d’Andréis soutenait que le Scoutisme en France aurait du être, comme en Angleterre, un mouvement unique et national avec des troupes confessionnelles et des troupes neutres.
Avant de mourir, il avait déploré les brisures et les crises qui débutaient et apporta son soutien à la fondation des Eclaireurs Neutres.
Sources concernant l’Abbé d’Andreis :
- - « Mémoire du scoutisme » de Louis Fontaine
- - « Les Origines du Scoutisme à Nice » (Editions Thomé)
- - « Aux Sources du Scoutisme Français » Editions du Scorpion, 1961
- - « Articles paru dans Kim » (N°28 et 29)